- Introduction
- Rappels préliminaires et historiques
- 1. La démocratisation par le bas des régimes représentatifs
- 2. L’érosion de la participation des citoyens
- Conclusion
- Perspectives : vers des régimes de démocratie directe pure ?
- Annexes
- Bibliographie et références
L’étude de l’évolution de l’institution référendaire marquée par le phénomène généralisé de l’abstentionnisme conduit à se demander si les régimes démocratiques modernes ont raisonnablement intérêt à poursuivre le même chemin ou à s’engager dans la voie de démocratie directe. En effet, il paraît légitime d’utiliser de plus en plus l’instrument référendaire pour que certaines questions soient tranchées directement par le peuple mais dans les trois pays étudiés le taux de participation s’approche de 30% depuis une dizaine d’année. En France par exemple la réforme du quinquennat a été adoptée avec, au final, seulement 21% de la population officiellement favorable à une réduction du mandat présidentiel. La légitimité d’une telle réforme est tout à fait discutable et tout à fait contraire au principe selon lequel la loi est l’expression de la volonté générale. Ce phénomène caractérise tous les régimes démocratiques d’Europe. Un point important, qui tend à indiquer que ce constat devrait malheureusement perdurer, est que l’abstention concerne principalement les jeunes générations.
Si dans la partie précédente de ce mémoire, certaines caractéristiques auxquelles doit répondre un référendum ont été énoncées afin de lutter contre l’abstentionnisme, il n’en demeure pas moins que l’origine première du problème est plus profonde et semble difficile à combattre. L’abstentionnisme ou le vote contestataire ne sont que la manifestation extérieure de la crise que subissent les régimes démocratiques. Les gouvernements tentent en vain de lutter contre ce phénomène ; toutefois il est vrai que tenter de relancer le militantisme ou rendre une image de confiance n’est pas chose facile, surtout, comme nous l’avons vu, dans le contexte de ces trente dernières années. Ainsi les solutions envisagées plus haut ne semblent pas à elles seules suffisantes pour obtenir l’effet radical dont les régimes ont besoin pour conserver leur valeur démocratique.
Un certain nombre de moyens parallèles sont en train d’être mis en place. Ainsi parle-t-on beaucoup en ce moment de la possibilité de voter par correspondance par le biais d’un ordinateur et de la toile internet. Ce système est entré en vigueur depuis deux ans en Suisse et donne des résultats, pour le moment, tout à fait concluants : la participation serait en moyenne de 50%, donc supérieure de 20 points à la moyenne suisse. Mais, si le vote par correspondance a effectivement pour but de relancer la participation électorale, en particulier auprès des jeunes électeurs, il y a fort à parier que les récents résultats positifs, malgré ce qu’annonce le gouvernement suisse, ne soient que le fruit de l’effet de mode suscité par la nouveauté. De plus cette méthode n’est pas exempte de reproches : si le vote est « électronique » alors il faut s’assurer que le débat qui se crée au même niveau, c’est à dire sur le Net, est lui-même démocratique. Des groupes de pression peuvent facilement s’immiscer, à différents niveaux, dans les débats des « salles électroniques » de discussion et les influencer sans que l’on puisse réellement s’assurer que toutes les parties peuvent s’exprimer « à jeu égal ».
Pour beaucoup, ces moyens dérivés n’offrent qu’une façade de renouveau démocratique et de renaissance du sens civique dans l’esprit de la population. Il faudrait que les problèmes majeurs, de fond, qui ont une influence sur la participation électorale en générale, soient traités pour que ces nouvelles méthodes aient réellement un effet positif à long terme.
Peut être la solution la moins utopique et la plus facilement réalisable dans le contexte actuel est ce que l’on appelle la « démocratie de participation ». Elle apparaît en cette période comme une solution intermédiaire qui répondrait à la fois aux difficultés liées à la crise de la démocratie représentative et à « l’illégitimité » des décisions résultant de la technique référendaire lorsque l’abstention est élevée. Un exemple de démocratie participative existe en France depuis la « Conférence des citoyens sur les organismes génétiquement modifiés » de 1998. Il s’agissait de proposer à un groupe de citoyens, représentant au mieux la population française dans ses diversités, de participer à une conférence organisée dans le cadre de l’Assemblée Nationale. Cette conférence avait pour objet de mettre un groupe de citoyens en relation avec des experts d’un domaine donné pour leur permettre de comprendre les enjeux exacts d’un sujet d’importance particulière. Ensuite, à la lumière des explications reçues, les citoyens ont rendu un avis motivé concernant ce qu’ils pensent être la bonne attitude face au sujet. Cet avis doit servir d’une part à éclairer les autorités publiques sur les vœux réels des citoyens et, d’autre part, de relancer le débat public mais sur des bases scientifiques, raisonnables, non polémiques. Cette nouvelle forme de démocratie pourrait être une des mieux adaptées à la crise que subissent nos sociétés post industrielles.