1. La démocratisation par le bas des régimes représentatifs

Cet article fait parti de la série Le désinteressement au référendum. Article 3 sur 8.

Les Constitutions des trois pays étudiés, la France, l’Italie et la Suisse, ont toutes prévues les cas dans lesquels un référendum devra ou pourra être mis en place. La description du cadre référendaire originel est importante dans l’étude de la désaffection des citoyens au référendum. En effet, une des raisons primordiales de l’abstentionnisme actuel est la dérive qu’a subie, de la part des organisateurs, la pratique du recours au référendum dont l’utilisation va souvent beaucoup plus loin que ce que permettraient les dispositions constitutionnelles. Ces dérives seront étudiées plus tard.

La typologie des référendums est très diversifiée et varie selon les pays. Il existe en effet un grand nombre de référendum. Ainsi pourrait-on distinguer entre référendum de consultation qui est mis en place par le Parlement indépendamment de toute disposition explicite. Juridiquement il n’a pas de valeur contraignante à l’égard des Institutions, toutefois dans une démocratie il a la même valeur morale que les référendums dit de décision. Ces derniers en fonction de leurs objets sont soit des référendums législatifs soit constitutionnels. Les premiers vont avoir pour fonction de permettre ou d’empêcher l’entrée en vigueur d’une nouvelle disposition législative, les seconds, une disposition constitutionnelle.

Afin de structurer l’étude des référendums existants en France, Italie et Suisse, on distinguera comme le fait habituellement la doctrine entre les référendums initiés par les pouvoirs publics et les référendums d’initiative populaire.

1.A – Initiative par les pouvoirs publics

Que ce soit dans les régimes semi-représentatifs ou semi-directs comme la Suisse et l’Italie, le référendum initié par les pouvoirs publics (gouvernement ou parlement) a deux fonctions principales :

Soit résoudre un conflit survenu au sein de la majorité à la suite d’une question produisant de très grandes divisions en son sein. Le référendum apparaît alors comme la solution de facilité. Il est vrai qu’en général ce sont des décisions difficiles à prendre, en conséquence il permet aux partis politiques au pouvoir de se déresponsabiliser en faisant appel au peuple.

Soit, au contraire, le référendum permet de résoudre des questions dites transversales, c’est à dire ne pouvant être tranchées selon les traditionnels clivages partisans (droite-gauche). Ces référendums ont été nombreux durant le dernier quart du 20ème Siècle en Europe en raison de la construction européenne.

En France, l’histoire des référendums étant particulière, on peut lui octroyer une troisième fonction. Certaines initiatives référendaires du Chef de l’Etat vont avoir pour objectif de renforcer sa légitimité vis à vis du peuple et d’assoir sa position dominante au sein du gouvernement. Cela n’est vrai que si l’instrument est organisé à priori avec la certitude que le taux de participation sera élevé et que le nombre de voix favorables sera très supérieur à une petite majorité absolue.

Afin de synthétiser l’étude malgré la grande diversité des référendums existants, c’est dans ce paragraphe que seront étudiés les référendums définis comme obligatoires par les Constitutions. Dans ce cas, une quelconque initiative n’a pas lieu d’être étant donné que c’est la Constitution qui imposera le recours au référendum.

France

Selon les articles 11 et 89 de la Constitution de 1958, les référendums sont toujours facultatifs. La décision de déclencher une consultation populaire appartient uniquement au Chef de l’Etat. Lors de l’élaboration de la Constitution de 1958, De Gaulle avait tranché les divergences existant entre deux grands constitutionnalistes : René Capitant et Michel Debré. Ces articles correspondent bien à l’esprit dans lequel le Général interprétera plus tard la Constitution, une interprétation présidentialiste du régime de la Cinquième République dans lequel le Président détient de large pouvoir.

L’article 89 permet de soumettre au peuple un projet de révision de la Constitution. Toutefois l’appel au peuple n’est possible que lorsque le texte proposé a déjà été approuvé en terme identique par les deux assemblées parlementaires. Il revient ensuite au Chef de l‘État de décider si le texte sera adopté en Congrès ou par le peuple. En pratique la voie suivie a toujours été celle du Congrès jusqu’au référendum de 2000 sur le quinquennat.

L’autre possibilité de déclenchement d’un référendum en France est contenue dans l’article 11 de la Constitution de 1958. Cet article fait partie des innovations les plus importantes de la Cinquième République. Au terme de celui-ci, un référendum législatif peut être organisé soit sur proposition du gouvernement, soit des deux Assemblées. Si le Président décide de donner suite à cette proposition, le peuple pourra approuver une loi directement sans qu’elle ait été votée par le Parlement.

Tel que l’avait envisagé les constituants de 1958, le référendum ne pouvait avoir pour objet qu’une question concernant « l’organisation des pouvoirs publics ou la ratification d’un traité qui sans être contraire à la Constitution aurait des incidences sur le fonctionnement normale des Institutions ». La loi Constitutionnelle de 1995 a beaucoup élargi le champ initial en ajoutant que la question pourrait aussi porter sur « les réformes relatives à la politique économique et sociale de la Nation et au service public qui y concourent ». Cependant l’ambiguïté des termes issus de la réforme ne permet de déterminer précisément le champ des questions qui pourront être soumises à référendum. Cette lacune textuelle sera certainement comblée par la pratique et sera fonction de la personnalité des futurs organisateurs.

L’utilisation de l’article 11 pour une révision constitutionnelle, afin d’éviter le veto du Sénat, tel que cela s’est produit sous la présidence de de Gaulle en 1962 (le référendum portait sur l’élection du président au suffrage universel direct) est considérée actuellement comme une coutume constitutionnelle malgré le scandale juridique que ce détournement de la Constitution avait produit a l’époque.

Enfin, l’abstentionnisme a été tellement fort lors des derniers référendums qu’une proposition de révision constitutionnelle vient d’être élaborée par le Sénat. Selon cette proposition, l’article 11 de la Constitution pourrait être complétée par un quatrième alinéa qui disposerait : « la proposition soumise au référendum n’est adoptée que si la majorité des électeurs inscrits sur les listes électorales a pris part au vote ». Cette proposition répond au taux de participation très bas des dernières consultations. Nous verrons comment elle peut être interprétée plus bas.

Italie

La possibilité de référendum constitutionnel, article 138 de la Constitution, est déterminée par la loi du 25 mai 1970. Ce référendum est facultatif et, de plus, ne peut être déclenché que lorsque la révision de la Constitution n’a pas été obtenue à la majorité des 2/3 de chaque Assemblée. Dans le cadre d’une initiative des pouvoirs publics, ce référendum peut être déclenché par 1/5 des membres d’une chambre ou cinq conseils régionaux. Mais une initiative populaire est aussi possible. Jusqu’à 2001, aucun référendum constitutionnel n’avait été organisé selon l’article 138 de la Constitution.

L’article 132 prévoit aussi un référendum obligatoire pour la fusion de régions ou la création de nouvelles régions, mais le référendum n’a lieu que dans les régions concernées.

En 1989, le Parlement italien, par une loi spéciale, a déclenché un référendum facultatif. Ce dernier a put être mise en œuvre en dehors de toute disposition explicite car juridiquement le résultat ne lie pas l’organisateur. Il est donc logiquement dénué de tout caractère obligatoire mais moralement sa valeur est tout autre car les électeurs italiens ont répondu très favorablement à ce référendum facultatif concernant l’attribution de pouvoirs constituants au Parlement européen.

Suisse

Il n’existe en Suisse qu’un seul type de référendum à l’initiative des pouvoirs publics : il est à l’initiative du Parlement lorsque ce dernier envisage une proposition de révision constitutionnelle (article 120 de la Constitution Fédérale), toutefois le texte résultant de l’initiative devra être approuvé directement par le peuple. Quelque soit l’auteur d’une révision constitutionnelle, qu’elle soit totale ou partielle, le peuple suisse doit obligatoirement être consulté sur la question par référendum. Le référendum constitutionne de nature obligatoire a été introduit dès la mise en place de l’Etat Fédéral en 1874.

Les autres référendums constitutionnels sont obligatoires :

Selon l’article 89 bis de la Constitution le référendum est obligatoire pour valider les « arrêtés fédéraux d’urgence qui dérogent à la Constitution ». Il doit être organisé dans le délai d’un an et être validé s’il obtient la double majorité des voies et des cantons.

L’article 89-5 l’impose aussi pour l’adhésion à des organes de sécurité collectives ou à des communautés supranationales. De nombreux référendums ont été organisés en Suisse sur le fondement de cet article comme dans tous les pays d’Europe.

L’obligation constitutionnelle selon laquelle il faut une double majorité résulte du fait que la suisse est un Etat fédéral et que la majorité en matière constitutionnelle est à la fois celle des électeurs et celle des cantons. Comme la Suisse est composée de vingt cantons et de six demi-cantons, il faut qu’une révision constitutionnelle soit approuvée par au moins treize cantons. Au départ, cette exigence supplémentaire en matière constitutionnelle fut introduite pour protéger les cantons d’une extension abusive des pouvoirs fédéraux.

1.B – Initiative populaire

Certaines Constitutions autorisent le déclenchement des référendums d’initiative populaire. Ils vont permettre à une fraction du corps électoral d’annuler une loi ou d’en créer une nouvelle.

Cette faculté est rare en Europe. Elle existe dans les pays où la démocratie populaire est très développée. Dans le cadre de notre étude, l’Italie et la Suisse bénéficient d’un tel système.

Il existe deux grands types d’initiatives populaires : les initiatives populaires directes et indirectes. Pour certains auteurs les référendums découlant de l’initiative populaire indirecte ne doivent pas être qualifiés de référendum d’initiative populaire. L’initiative populaire directe permet à une fraction du corps électoral d’élaborer des normes qui après avoir été soumises au vote populaire par le biais du référendum créeront de nouvelles lois. L’initiative populaire directe n’est, à aucun stade, soumise au contrôle des gouvernants. La norme soumise à consultation est élaborée par les déclencheurs de l’initiative.

Par opposition les initiatives indirectes ne placent pas le peuple en position de concurrent du législateur. Le vote du peuple ne constitue pas une nouvelle source de législation. Les citoyens disposent d’un droit de veto sur le Parlement ce qui leurs permet un simple contrôle du pouvoir législatif, contrôle qu’il exerce souverainement et exclusivement. Cette distinction pourrait paraître futile en théorie mais a une grande importance en pratique :

Dans le premier cas les citoyens jouent un rôle de concurrent du pouvoir législatif et ont la faculté de créer des normes nouvelles qui intégreront l’ordre juridique en court-circuitant le Parlement. Cela a pour fonction de permettre à une minorité qui n’a aucun poids dans le processus décisionnel de se faire entendre et de proposer des questions qui n’ont pas été envisagées par les acteurs politiques ou les organes représentatifs.

Dans le second cas les citoyens ont un rôle plus modeste qui leur permet uniquement de censurer le travail du législateur. Le peuple dispose alors de la faculté des juridictions constitutionnelles traditionnelles et peut intervenir en tant que législateur négatif.

L’initiative populaire en Italie et en Suisse

Le référendum d’initiative populaire directe en Italie n’existe pas en théorie. La constitution prévoit qu’une initiative populaire ne pourra être mise en œuvre que sur des lois constitutionnelles qui viennent d’être adoptées par le Parlement ou dans le but d’obtenir l’abrogation d’une loi ou de toute norme de même rang. Nous verrons plus tard qu’une lourde dérive des dispositions constitutionnelles va être tolérée par la Cour Constitutionnelle en réponse au blocage que subit le Parlement Italien. En effet le référendum abrogatif partiel va être couramment utilisé pour créer de nouvelles lois ou engager de larges réformes tout en court-circuitant l’inertie parlementaire.

La Constitution prévoit ces initiatives dans deux articles :

– L’article 138 de la Constitution prévoit que lorsque les lois constitutionnelles sont adoptées à la majorité absolue des membres de chaque assemblée, en deux délibérations successives, séparées par un intervalle d’au moins trois mois, elles peuvent être soumises à référendum, avant leur promulgation, à condition de ne pas avoir recueilli la majorité des 2/3 des membres de chaque assemblée lors de la seconde délibération.

Les promoteurs de l’initiative doivent être au moins au nombre de dix et prouver leur qualité d’électeur. Cette demande a un effet suspensif. Pour que le référendum puisse se dérouler il faut ensuite récolter 500 000 signatures d’électeurs. L’entrée en vigueur de la loi va dépendre du résultat du référendum. Pour cela il faut qu’elle soit adoptée à la majorité des suffrages exprimés. Pendant cette période la loi, n’est pas promulguée elle est seulement publiée au journal officiel.

Le premier référendum constitutionnel d’initiative populaire a été organisé le 7 Octobre 2001. La loi portait modification du titre cinq de la Constitution. Cette réforme avait pour objet de laisser plus d’autonomie aux régions vis à vis du pouvoir central. Cette loi, portant sur un thème pourtant cher aux yeux des italiens, a été adoptée avec un taux de participation très bas de 34,2%.

– L’article 75 de la Constitution permet à une fraction du corps électoral d’intervenir par référendum en matière législative et d’exercer un droit de veto sur le Parlement. Si le plus souvent le référendum a pour objet d’abroger une loi, il peut également porter sur toutes normes de rang législatif. Ainsi peuvent être abrogés les décrets législatifs et les décrets lois. L’abrogation peut porter sur toute ou partie du texte et, à la différence du référendum constitutionnel, peut avoir lieu à tout moment. Par contre le déclenchement de l’initiative n’a pas d‘effet suspensif. L’article 75 dispose, en outre, que l’abrogation ne pourra porter sur des lois budgétaires ou fiscales, sur les lois d’amnistie et de remise de peine et enfin sur les lois autorisant la ratification de traités internationaux.

La Cour constitutionnelle italienne a joué un rôle très important par sa jurisprudence dans le cadre du contrôle des référendums abrogatifs. Cet aspect sera étudié plus tard. Toutefois, dans le cadre du contrôle de constitutionnalité qu’elle a pour fonction d’exercer, elle a déjà, sur les 127 référendums qui ont été soumis à son jugement depuis 1972, déclaré inconstitutionnel soixante-quatre référendums.

Le référendum abrogatif italien se distingue aussi par le fait que l’article 75 prévoit un quorum de participation (50%+1) en dessous duquel même si un nombre plus important de citoyens vote oui à l’abrogation, celle-ci n’aura pas lieu. Par contre comme le référendum constitutionnel, la demande doit émaner de 500000 électeurs. Cette disposition devient importante depuis 1997 : les référendums du 17 Juin 1997, du 18 Avril 1999 et du 21 Mai 2000 n’ont pas atteint le quorum suffisant pour permettre l’abrogation des lois malgré un haut pourcentage de oui.

En Suisse, l’initiative populaire est prévue par la Constitution dans les articles 138 et 139. Ces derniers ont été intégrés dans la Constitution fédérale en 1891. Ces dispositions sont les seules qui donnent la possibilité aux citoyens de créer la norme qui sera soumise à référendum. De l’élaboration à l’entrée en vigueur effective, en principe, il n’y a à aucun moment intervention des pouvoirs publics. Toutefois, en certains cas, l’Assemblée Fédérale peut proposer parallèlement à la proposition des initiateurs un contre-projet qui sera également soumis au vote du référendum. Ce dernier a d’ailleurs souvent eu la faveur des électeurs.

La procédure de révision est différente selon qu’elle a pour objet la révision totale ou partielle de la Constitution.

Dans l’hypothèse d’une révision totale de la Constitution, les initiateurs doivent récolter 100000 signatures d’électeurs. Lorsque la récolte des signatures est terminée, un premier référendum est organisé concernant l’opportunité du vote. Si une majorité simple de citoyens acceptent le principe, les deux chambres sont renouvelées. Le nouveau Parlement élabore une proposition conforme à l’initiative. Cette dernière sera soumise à référendum si elle est approuvée à la majorité des électeurs et des cantons.

Dans l’hypothèse d’une révision partielle, la récolte de signatures de 100000 citoyens est aussi exigée. Si le Parlement fédéral approuve la demande, il élabore une proposition de révision conforme aux vœux des promoteurs de l’initiative. Cette proposition est ensuite soumise au référendum et doit recueillir la double majorité des votants et des cantons. Si le Parlement fédéral n’est pas d’accord avec la demande de révision, comme pour la procédure de révision totale, un référendum de principe a lieu. Si une majorité d’électeurs se prononce en faveur de la révision lors du premier référendum un second référendum est organisé à la suite d’une proposition de révision par le Parlement, la double majorité est encore nécessaire.

Enfin, si lors d’une initiative de révision partielle, la proposition est dite « rédigée », c’est à dire qu’il s’agit d’une proposition qui peut s’insérer directement dans la Constitution, aucun référendum de principe n’est organisé. Par contre le Parlement fédéral peut établir une contre proposition qui sera soumis à référendum en même temps que le projet résultant de l’initiative populaire.

Depuis 1874, la Constitution fédérale autorise le référendum législatif d’initiative populaire. Depuis 1971, il permet, après la récolte de la signature de 50 000 citoyens, d’organiser un référendum portant sur une loi fédérale ou un arrêté fédéral. Ainsi et selon l’article 141 de la Constitution fédérale, les actes du Parlement peuvent, dans les 100 jours suivant leur adoption, être soumis à l’approbation des citoyens. Dans ce cadre, les citoyens exercent un contrôle du travail du Parlement en disposant d’un droit de veto. Le déclenchement du référendum suspend l’entrée en vigueur du texte. Toutefois, pour éviter que ce système ne retarde trop le processus législatif, le Parlement, à la majorité des membres de chacune des assemblées, peut prendre la décision de déclarer l’urgence d’une loi fédérale. Cela a pour conséquence d’empêcher tout déclenchement référendaire. Ces lois ont alors une durée de validité inférieure à un an car, à la fin de cette période, elles ne peuvent produire aucun effet juridique. Nous le verrons, c’est ce référendum qui a produit le plus d’impact sur le régime politique suisse en général.

Les conséquences du référendum d’initiative populaire sur le système politique

La conséquence la plus importante est de favoriser la pratique du consociativisme selon lequel la majorité au Parlement admet la participation de l’opposition dans le processus de prise de décision. La démocratie du consensus est mise en avant par opposition à la démocratie majoritaire. Ainsi, le travail législatif ne peut faire plus tard l’objet d’un référendum abrogatif initié par une minorité parlementaire ou par l’opposition. Le statut de l’opposition a donc une place fondamentalement différente de celle des régimes majoritaires classiques.

Dans un système ou l’initiative populaire existe, le programme politique du gouvernement en place est très facilement perturbé : il est difficile pour le pouvoir en place d’établir un programme politique cohérent à long terme car l’initiative populaire apporte des questions extérieures à l’agenda politique prévu initialement. De même le travail du pouvoir législatif, pour les mêmes raisons, est aussi perturbé. Même lorsque la proposition soumise à référendum n’aboutit pas à un grand succès lors du vote, le déclenchement de l’initiative va obliger les organes décisionnels à ouvrir des discutions sur le sujet même lorsqu’ils l’avaient évincé de l’agenda politique volontairement.

De plus, lorsque le peuple se prononce directement par voie de référendum sur l’annulation ou sur la création d’une loi, les organes décisionnels peuvent être liés selon la généralité de la proposition référendaire à l’ensemble de la matière par la décision du peuple souverain. Il y a donc un affaiblissement du pouvoir législatif et exécutif.

S’agissant plus précisément du référendum d’initiative populaire direct, on reproche souvent à ce mécanisme l’absence de garantie pour le droit des minorités. Selon certains, seules les élites parlementaires auraient la capacité de construire des compromis et d’intégrer les intérêts des minorités.

Dans le cas d’une loi « fabriquée » par un groupe de citoyens les droits des minorités ou leur protection peuvent être menacés. Au contraire une petite minorité très bien organisée et disposant de moyens importants (financiers, presse, média) peut imposer une position contraire aux intérêts de la majorité. En pratique cet argument contre l’initiative directe est à relativiser.

L’exemple suisse qui autorise ce mécanisme montre que malgré certaines propositions xénophobes ou racistes, les électeurs ont toujours répondu avec un certain bon sens. Toutefois il faudrait faire remarquer malgré tout que ce système présente un inconvénient non négligeable et qu’il réclame des citoyens la faculté de prendre un certain recul au moment du vote par rapport à leur préférence immédiate et à leurs intérêts strictement personnels.

Cette nécessité de perspective à long terme n’a jamais été gravement violée jusqu’à maintenant mais le contexte mondial actuel, le sentiment d’insécurité ambiant, la tendance de certains médias, pourraient rendre les initiatives populaires réellement dangereuses pour les minorités.

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