2. L’informatique à bord d’un voilier

Cet article fait parti de la série L'informatique au service de la voile. Article 4 sur 7.

2.1 Introduction

Un PC est-il une absolue nécessité sur un voilier ? Bien sûr, il peut lire la cartographie numérique, il peut décharger et afficher les images du photoscope, décrypter les signaux météo, mais est-il réellement devenu un besoin indispensable sur un petit bateau de moins de 40 pieds ?

La généralisation des cartes numérisées et les progrès de l’électronique du bord amènent à se poser la question de l’utilité d’un PC à bord pour la croisière. A quoi peut bien servir un PC à bord ?

En premier usage, exploiter la cartographie électronique et le GPS. Cela permet d’avoir une collection considérable de cartes qu’il serait impossible d’avoir sur papier. Les programmes actuels sont très élaborés, ils intègrent météo et polaires et permettent le routage

Décoder (avec un récepteur et une interface) toutes les cartes et météo émises en décamétrique. Le problème est que ces émissions sont de plus en plus rare.

Envoyer et recevoir des télécopies et mails en côtière par une liaison GSM (ou par satellite). L’avenir s’oriente vers une liaison Internet à bord, en décamétrique ou satellite.

Récupérer, regarder, et trier les photos de prises par le photoscope.

C’est pour toutes ces raisons et de nombreuses autres que posséder un ordinateur à bord est devenu un chose courante. Dans la partie qui suivra nous allons seulement nous intéresser à l’exploitation des cartes de navigation car cela reste l’utilisation principale faite du PC à bord.

2.2 A quoi peut servir un PC à bord ?

Le principal avantage d’avoir un PC à bord est de pouvoir exploiter pleinement les nouveaux médias de stockage que sont les DVD et les clés USB. Cela permet d’avoir une collection considérable de cartes qu’il serait impossible d’avoir sur papier. Les programmes actuels sont très élaborés, ils intègrent météo et polaires et permettent le routage.

2.2.1 Cartographie numérique

Les systèmes de cartographie sur CDs fonctionnant sur PC portables ou agendas de poche (Palmtops). Une alternative aux cartouches en ROM des traceurs interfacés aux GPS. Aujourd’hui le choix est entre l’ancien format bit mapping et le nouveau format vectoriel.

Maintenant, quelques nouvelles cartes sont peu onéreuses et certaines sont téléchargeables gratuitement depuis Internet.

Il est intéressant d’étudier quelques-uns uns de ces logiciels afin d’en cerner les possibilités.

Les anciennes cartes bit mapping

C’est de la digitalisation simple de cartes papiers. L’inconvénient du BMP est que tout est sur le même plan, il est impossible d’effacer sélectivement les lignes de sonde, les noms, etc. , de changer les couleurs des éléments… Les polices sont à taille fixe et la taille des textes dépend évidement de l’échelle de lecture. Cela équivaut à une « photo » d’une carte papier. Les BMP prennent beaucoup de place en mémoire. C’est le format historique de la cartographie issue du papier, mais il est maintenant en fin de vie.

La cartographie Maptech

Maptech fut le pionnier de la cartographie sur CDRoms en 1990. Il s’agissait alors d’une révolution car à l’époque il n’existait quasiment aucun CD non audio et les meilleurs lecteurs étaient des 2X. Les cartes maritimes étaient scannées en bitmap propriétaires (format BSB avec une légère variante) puis découpées en petits carrés en nombre variable suivant les cartes, environ en 10 colonnes par 10 lignes.

Quand ce système a été adopté en 1990 il était révolutionnaire, c’était le tout premier format de carte scannée disponible. Les PCs du moment n’avaient que très peu de mémoire et étaient incapables de traiter de gros fichiers BMP d’une dizaine de Mo. Le Dos ne laissait que 600 ko de mémoire totale. Chaque petit morceau d’image affichée occupe de 30 à 150 ko. Le BSB est une forme de BMP, c’est à dire que chaque pixel d’information est codé sur un bit, blancs compris.

Pour exploiter ces CDs de cartographie, deux programmes Maptech Pilot et Pro étaient vendus. Ces deux programmes fonctionnent encore bien mais ils sont anciens et leur ergonomie est rustique. Le passage à la frontière d’une carte est mal géré, il faut aller chercher manuellement la nouvelle carte à charger. Les logiciels actuels savent gérer ce format historique. Ces cartes en quasi monochrome sont maintenant évidement périmées.

Les nouvelles cartes vectorielles

La fabrication des fichiers est beaucoup plus complexe, toutes les cartes ont été ressaisies à la main sur table graphique par des cartographes. Chaque type d’information est sur un plan différent, tout peut donc être paramétré, affecté à une couleur ou éliminé. C’est l’avenir de la cartographie car les possibilités sont illimitées. La compression des données est très efficace comparée aux BMP, il est possible de rentrer beaucoup plus d’informations dans un volume identique. Une banque de données peut ainsi très facilement générer des cartes totalement différentes suivant les besoins marketing. Chaque famille de données (les diverses couches) peut être traitée pour s’adapter au résultat demandé, aux possibilités d’affichage, au volume disponible… Des améliorations ponctuelles, en augmentant le détail ou en corrigeant une zone intéressante, peuvent être apportées en permanence sans mettre en péril les données et les cartes les exploitant.

Jusqu’à début 2001, la majorité des logiciels de cartographie exploitait uniquement les anciens formats de données en BMP. La diffusion des cartes vectorielles change tout, et les nouvelles versions des outils de cartographie intégreront directement les formats vectoriels.

Format vectoriel Navionics

Navionics est un des deux leaders des cartes vectorielles en cartouches (l’autre étant C-MAP). Les données vectorielles sont très compactes. Navionics a choisi de découper le monde en un grand nombre de zones, chacune diffusée sur des CD Il ne s’agit pas d’un programme permettant de lire tous les formats de cartes, mais une exploitation directe des cartes vectorisées propriétaires, sur un PC portable en navigation et sur cartouches programmables pour les traceurs. Les CDs Navionics contiennent la base mondiale de toutes les cartouches distribuées par la marque, c’est une vraie mine d’or, ces cartes vectorielles (seamless cartography) sont superbes, les cartes de détail montrent les pannes dans le port. Il permet aux grands navigateurs de n’avoir qu’une ou deux cartouches à bord en le reprogrammant au cours du voyage. Le CD contient aussi un outil de visualisation et un outil d’impression du catalogue qui ne demande aucun matériel particulier supplémentaire. Il permet de sélectionner avec soin la cartouche à commander en examinant au préalable le contenu détaillé.

Navionics ne diffuse pas au public le jeu de CDs servant à reprogrammer les cartouches. Cette opération peut se faire seulement dans les seules stations agréées.

2.2.2 Comparaison des différentes cartes

Dans cette étude nous allons comparer les deux cartes évoquées plus haut. Il s’agit évidemment des deux extrémités mais on peut ainsi mettre en évidence les différents points à comparer lors du choix des cartes.

Maptech Navionics

La carte Maptech originale était uniquement en noir et blanc et occupait 150 kilo-octets maximum tandis que les nouvelles cartes vectorielles occupent plusieurs dizaines de mega-octets.

Étude comparative cartes bitmap / vectorielles

Les inconvénients des cartes bitmap :

  • Manque d’interactivité : pas d’alarmes possibles.
  • Elles sont très volumineuses en mémoire ( environ 700 Mo pour une carte A0).
  • La taille importante des fichiers les rend inutilisables sur des appareils mobiles ou à faible capacité.
  • La taille importante induit une certaine lenteur d’affichage.
  • Effet de pixellisation lorsque le zoom est trop important.

A l’opposé les cartes vectorielles sont beaucoup plus légères en terme de mémoire que les cartes scannées. Alors qu’il faut environ 700Mo pour une carte scannée, une carte vectorielle se contente de seulement 1Mo. Ainsi, les cartes vectorielles ont rendu possible l’utilisation de la cartographie marine sur des appareils mobiles ou à faibles capacités.

Le type d’utilisation

Le marché des outils de cartographie est très compétitif, du gratuit au très cher, du très simple qui positionne simplement sur la carte au très subtil avec météo, routage, régate… Le choix de la carte dépend donc de l’utilisation que l’on souhaite en faire. Il est inutile d’acheter le logiciel et les cartes vectorielles si l’on pratique la voile occasionnellement à titre de loisir.

Le type de format de stockage

On retrouve ici la différence de qualité entre les cartes bitmap et les nouvelles cartes vectorielles. Mais un autre critère tout aussi important à prendre en compte est si le format est ouvert ou pas c’est à dire si les cartes peuvent être lues en dehors du programme développé par l’éditeur. En cas de format propriétaire cela oblige à acheter les programmes correspondant aux cartes achetées et inversement lors de l’achat d’un programme cela oblige à acheter seulement les cartes du développeur du programme.

Entrée GPS

Il doit recevoir l’entrée GPS par une liaison NMEA 183 (détails en annexe 3). Tous les logiciels savent traiter le NMEA 183, mais les nouveaux PC n’ont plus l’ancienne norme RS-232 que l’on trouve encore sur de vieux GPS.

2.3 Quel ordinateur choisir ?

2.3.1 Portable ou classique ?

Sur les bateaux de petites tailles un ordinateur portable est la solution la plus adaptée du fait de la petite taille de la cabine. Sur un bateau ou il y a de la place un PC de bureau présente de nombreux avantages :

  • La maintenance est beaucoup plus facile car un portable est généralement impossible à dépanner en croisière alors que les pièces détachées d’un PC classique se trouvent dans le monde entier.
  • Ce matériel classique est moins cher, y compris avec un moniteur LCD de 15″, un bel ensemble se retrouve au prix d’un portable moyen.
  • Il n’y a pas de batterie qui se dégradera très vite.

Mais il y a aussi des inconvénients :

  • Matériel plus encombrant. Il vaudra bien le ventiler en branchant la sortie du ventilateur de l’alimentation sur une gaine débouchant dans la cabine, l’air étant aspiré par une grille à la base.
  • Une consommation importante d’électricité dans un milieu où on en dispose de très peu.

Il existe plusieurs méthode pour réduire cette consommation :

  • Acheter du matériel récent moins gourmand en électricité.
  • N’installer que le matériel nécessaire (pas de carte réseau par exemple)
  • « Under-clocker » le CPU, c’est dire réduire la fréquence de travail du processeur.

Malgré toutes ces améliorations un portable équivalent consommera toujours beaucoup moins. La suite de l’étude sera donc uniquement destinée aux ordinateurs portables car un ordinateur n’offre aucun avantage s’il est éteint.

2.3.2 Critères de sélection

Il faudra choisir le PC portable suivant divers critères, sans oublier le prix. Un bon produit d’entrée de gamme se trouve autour de 1300 €, et en étant à l’affût de certaines promotions il est possible d’en trouver autour de 1000 € en supermarché.

Consommation minimale

C’est un critère majeur avec la généralisation de la superbe cartographie sur CDRoms, car le PC reste allumé en permanence en navigation. Une nouvelle génération de processeurs les Pentium Centrino sur le marché a des consommations remarquablement basses.

Processeur

Un processeur Pentium III ou AMD assez rapide fera l’affaire. Le matériel à la mode du moment évolue vite, il est inutile d’acheter le plus rapide, il est beaucoup trop cher et consomme trop, de toute manière, il sera périmé l’an prochain. Il vaut mieux choisir le milieu de gamme en promotion au moment de l’achat. Choisir un processeur qui offre la possibilité d’être « under-clocké » afin d’économiser de l’énergie.

Le maximum de RAM

L’ordinateur doit être équipé d’une quantité importante de RAM 128 Mo au minimum. Pour exploiter les lourds programmes notamment Windows XP 256 Mo sont un minimum. Acheter la RAM supplémentaire immédiatement, elle peut être d’un modèle qui sera introuvable dans 6 mois. La RAM pour PC portable est beaucoup plus chère et rare que la barrette de RAM pour les fixes.

Les ports USB

Aujourd’hui la grande majorité des périphériques se branchent sur les ports USB (GPS, imprimante, sondes…). Il est important d’en disposer de quatre au minimum. Si les ports venaient à manquer il existe des hubs USB afin de partager ceux qui sont déjà occupés.

Le port série

Le port série sur DB9 est en fin de vie, comme le port parallèle, mais quantité de matériels l’utiliseront encore longtemps (NMEA du GPS, modems pour BLU, etc.). Il commence à se raréfier sur les matériels récents.

Système d’exploitation

Tous les programmes utiles à la navigation sont uniquement disponibles sous Windows. Le choix de programmes sous Linux est trop pauvre en marine pour choisir celui-ci.

Lecteur de CD-ROM

Pour naviguer la vitesse de lecture importe peu. Il servira pour la cartographie et à installer de nouveaux programmes. La quasi-totalité des matériels a un lecteur DVD d’origine, l’inconvénient est qu’il aura parfois des difficultés à lire certains CD. Un graveur est certainement plus intéressant, car il n’aura pas ces problèmes de lecture. Il est bien préférable d’utiliser un boîtier externe relié en USB2 ou Firewire qui recevra un lecteur ou graveur ordinaire, ce qui simplifie grandement le SAV au bout du monde.

Les minis-PC

Les minis-PC disposent d’une carte mère bien plus petite qu’une ATX classique et comprenant d’origine tous les périphériques. En utilisant un CPU pas trop rapide, cela donne un très petit PC, silencieux et économique qui s’avère parfait pour une utilisation à bord. Il suffit d’ajouter moniteur LCD, clavier et souris. Il existe de nouveaux formats en mini-PC, IPX ou plus petits encore, consommant peu et allant très vite, avec tous les périphériques intégrés. Ces nouvelles solutions conviennent parfaitement sur les petits bateaux.

2.4 Conclusion

Les cartes numériques sont en progression constante comme le GPS, les deux sont liés. La cartographie s’affine, mais elle n’a pas la fiabilité des cartes papier. Elle s’impose car une énorme masse de données est archivée dans des supports minuscules. Le vectoriel donne de possibilités considérables.

Situation en 1980 : Inexistant.
Situation en 1990 : Cartes bitmap sur CDroms, très chères, sur ordinateurs portables.
Situation en 2000 : Cartouches dans les lecteurs de cartes abordables en affichage CGA, position GPS à 100 mètres près. Début de la cartographie téléchargeable depuis un CDRom.
Prévision pour 2010 : Cartographie et affichage haute résolution, en évolution constante, mises à jour grande précision et intégration des avurnavs en temps réels pour la zone grâce à la liaison radio Internet.

Les avantages de l’utilisation d’un ordinateur sont indéniables il permet ainsi aux navigateurs peu expérimentés de trouver leur route et d’éviter les écueils en mer.

Toutefois il faut toujours garder à l’esprit que les méthodes classiques de navigation ne doivent jamais être oubliées, carte papier, crayon, gomme et règle Cras, estime, veille et sens marin. En cas de dépendance totale vis à vis de l’ordinateur une panne de celui-ci pourrait avoir de graves conséquences.

Navigation dans les chapitres<< 1. L’informatique depuis la terre3. L’évolution dans les prochaines années >>

Laisser un commentaire